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Paris

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Les Fleuves de Paris
James Ragan

The Rivers of Paris
James Ragan

Rendez-vous
Blake Dawson

Anniversaire
(de la défaite à Diên Biên Phu)

-- Suzanne Paulot

Les Fleuves de Paris
James Ragan

à hauteur de poitrine en os descendus -- Dylan Thomas

Il pleut et les boulevards de Paris sont plongés
dans les os à hauteur de poitrine. Se confondent couramment,
dans le lai-de-pluie d’avril,
des images tels des ormes dressés
le long de Saint-Germain ou de Saint-Michel.

Les boulevards sont des fleuves que le vent doit
aux reflets de vos yeux et la lumière,
aux vitres transparentes que le vent tisse
autour du Sacré-Coeur, miroirs-sphères
dans le ventre arrondi
de l'imitation, claire-voie sur l'eau
qu'effleure la mouette seule
à son art suranné du vol.

Le long de la Seine, tous les trésors
des âges anciens renferment des os,
les fluides et les permanents,
la roche, le germe de l'océan
la masse d'air qui,
entre des arbres jumeaux,
oscille sur le quai Voltaire,
le souffle rauque du vent
dans le poumon du clochard
ravagé, fracturé
par des hurlements poussés dans la nuit.

Près du Pont-Neuf, les ossements de feuilles s'agitent
lorsqu'ils percent les imprévisibles
clairs des surgissements d'herbe.
Les os de Baudelaire
renferment des os, pesées éternelles,
formes de chapelles de marins aux teintes d'ocre
ombres-poèmes telles des runes nordiques
ou ponctuations fendues par les os de la langue
d'araignée des écrivains.

Dans le courant de conscience qui nous traverse
s'écoulent les fleuves de Paris
sur les escarpements du temps imaginé
en précipitant dans leur chute
leurs fardeaux d’images à l'ossature recomposée
tel le langage ou des ailes de chauve-souris
aspirant au vol inspiré.

C’est dans le râle de la mort unique
d’une pierre que réside le progrès
auquel nous parviendrons tous
avec le temps, chacun s’abattant
dans la pluie de son souffle,
imitations du Dantesque
que font confluer les corporels courants
dans les canaux de Montparnasse
trempés comme le nouveau-né et profonds comme le fleuve,
descendant des os.

(Transl. M Holm and Patrick Haon, Language Arts Director of p h i l o p h o n e m a ™ Nice)
© 2000 p h i l o p h o n e m a ™

 
 

The Rivers of Paris
James Ragan

‘breast-deep in bones descending’ -- Dylan Thomas

It is raining and the boulevards of Paris
are breast-deep in bones. It is usual
for images in the rain-lay of April
to merge like ascending elms
down Saint Germain or Saint Michel.
The boulevards are the rivers wind owes
to the eyes’ reflections, light
to the panes transparent
in the domes of air wind weaves
along Sacre Coeur, the sphered
mirrors in the belly-up
of imitation louvred upon the water
the lone gull skims, antiqued
in its art of flying.

Down the Seine all troves
of antiquity have bones,
the fluid and the permanent,
the rock, the sea’s seed,
the hunk of air
swinging between two trees
along the banks of Quai Voltaire,
the wheeze of wind
in the clochard’s lung,
shelled and fractured
by screams in the night air.

The bones of leaves along Pont Neuf seethe
when spearing the unpredictable
sheers of grass growth.
The bones of Baudelaire
have bones, timeless weights,
looms of ochre in their bethel’s shapes,
poem-shadows like Norse runes
or punctuations, splintered
by the bones of spiders’
writer’s tongues.

In all our streams of consciousness,
the rivers of Paris run
down the escarpments of imagined time,
their portmanteau of images
falling, boned together like language
aspiring to inspired flight.

In the single dying of a stone’s
last breath there is progress
we will all come to
in time, falling, each of us,
through the rain of our breath,
imitations of the Dantesque,
fused by the body’s currents
down the chutes of Montparnasse,
birth-wet and river-deep
in bones descending.

(from Womb-Weary, Grove Press, 1995)

 

Rendez-vous
Blake Dawson

Trouvé le sanctuaire :
deux âmes vides convoitent le carrefour ;
deux vaisseaux, qui funambulent au bord de la rupture
vers le hâvre douillet d'un troquet
vu à travers la vitre en pleurs de pluie,
se cherchent.

Tends la main vers le plus profond
au-delà de toi... de nous ! Touche-moi !
Renonce à la grâce, effleuré délicat d'un doigt ;
aux lévres assoiffées, le désir est offrande
et, sur la rive du ressentir,
des joies aigres-douces dansent,
inaperçues.

La flamme d'une bougie déhanche sa lumière
contre le lent reflux rouge d'une carafe.
Toi et Moi, deux mondes séparés,
face à face autour de cette nappe
ronde à carreaux bleus
-- la marche des pions sur le damier sacrificiel --
deux flûtes effleurées, vers l'ivresse,
intouchées.

Je suis arabesque
perdu dans les tournants de l'amour.
Je tombe dans le plus ancien des puits
-- l'abîme de ton regard vert-océan --
transporté, hypnotisé, désespérèment
absent.

(Empreintes d'un Chasseur, New Legend, 2001)

Comme poète et photographe, Blake Dawson trace la géométrie
de l'existence pendant qu'il expose les facettes mulitiples de la
condition humaine. Il se nourrit du passé sans être noyé dedans,
créant un art de synthèse qui dépasse les frontières et les idéologies
rigides. Ses textes ont inspiré des compositeurs, qui les ont mis en
musique. Il vit à Paris.

Anniversaire
(de la défaite à Diên Biên Phu)

-- Suzanne Paulot

Le mois de mai est revenu
L'an passé, c'était Diên Biên Phu.

Ô mon Dieu, faites que mon gars
Ne pourrisse pas
Dans les rizières de Thanhoa.

Jamais cette tendre verdure
N'a eu un éclat aussi pur.

Jamais les fleurs n'ont brillé
D'une si éclatante beauté.

Jamais le visage des gens
N'a eu tel épanouissement.

Jamais le soleil sur la terre
N'a versé si belle lumière.

Ô mon Dieu faites que mon gars
Ne pourrisse pas
Dans les rizières de Thanhoa.

Le mois de mai est revenu
L'an passé c'était Diên Biên Phu.

(7 mai 1955)

(Source: www.dienbienphu.org)